Pas de procédures, pas de problèmes : la Communauté politique européenne en tant que plate-forme pour le dialogue sur la sécurité

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, la présidente moldave Maia Sandu et le président français Emmanuel Macron lors du sommet de la Communauté politique européenne (CPE)
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Les détracteurs de la Communauté politique européenne (CPE) affirment qu’elle souffre d’un manque de profondeur institutionnelle qui limite son impact potentiel. Le rôle précis du format reste également flou, tout comme la valeur ajoutée qu’elle apporte aux institutions existantes telles que l’Union européenne, l’OTAN, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et le Conseil de l’Europe.

Cependant, face aux défis sécuritaires auxquels l’Europe est confrontée aujourd’hui, ces formats institutionnalisés ont leurs propres limites. Par exemple, l’OTAN et l’UE invitent et distinguent les membres et les partenaires, ce qui réduit l’éventail des perspectives présentes, et l’existence même de l’OSCE est menacée en raison de son exigence de prise de décision par consensus. La sécurité n’est qu’un des paniers de la CPE, mais c’est un panier dans lequel le format pourrait contribuer à combler certaines de ces lacunes et à compléter des forums plus institutionnalisés.

Dialogue sur la sécurité dans la CPE

Dans le domaine de la sécurité, la valeur de la CPE réside dans son potentiel à favoriser le dialogue. Elle pourrait s’avérer particulièrement utile dans les trois domaines suivants :

  1. Le CPE permet d’aborder des crises sécuritaires spécifiques. Comme d’autres formats d’engagement international de haut niveau, la CPE est avant tout une plateforme de dialogue au niveau le plus élevé. Cela est d’autant plus précieux que de nombreux participants à la CPE ont peu d’occasions de se rencontrer sur un tel « terrain neutre ». Le sommet de la CPE de juin à Chisinau, par exemple, a été une plateforme de dialogue entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie. La réunion de cette semaine à Grenade pourrait fournir une nouvelle occasion d’éviter une nouvelle escalade entre les pays.
  2. La CPE peut préparer le terrain pour de nouvelles initiatives en matière de sécurité. Le format offre un espace rare pour tester des idées lors de sessions à huis clos tout en promouvant publiquement des initiatives plus avancées. Certaines initiatives de la CPE pourraient plus tard s’épanouir dans un environnement plus formel tel que l’UE, l’OSCE ou l’OTAN. Sans le sommet EPC de Prague, la mission de l’UE en Arménie n’aurait probablement pas été possible ; Grenade est une occasion pour revoir son mandat.
  3. La CPE permet à des coalitions ad hoc de promouvoir des initiatives en matière de sécurité. Le nouveau format est propice aux initiatives qui rassemblent des pays en petits groupes. La CPE offre donc une occasion unique aux pays en marge du débat sur la sécurité européenne (pays non membres de l’UE ou de l’OTAN) de promouvoir leurs initiatives et de les voir soutenues ou approuvées par d’autres.

Trois points négatifs peuvent faire un point positif

En matière de sécurité, le manque d’institutionnalisation, de règles et de procédures de la CPE pourrait en fait être sa plus grande force :

  1. La CPE n’est pas un groupe de nations partageant les mêmes idées. Même sans la Russie et le Belarus, la CPE rassemble des pays dont les positions et les opinions stratégiques sont très diverses.
  2. La CPE n’est pas un format de partenariat. Chaque participant à la CPE peut contribuer à l’ordre du jour et dispose d’un siège égal à la table.
  3. La CPE n’est pas un format institutionnalisé. Le caractère informel de la CPE – y compris son absence de règles et de procédures – la rend plus agile que les organisations qui sont contraintes par des pratiques telles que la prise de décision par consensus.

Un forum informel et de haut niveau tel que la CPE, qui réunit des chefs d’État et de gouvernement, peut contribuer à créer les conditions nécessaires pour progresser avant que des processus plus institutionnalisés ne prennent le relais. Les participants à la CPE devraient s’appuyer sur ces atouts pour élaborer un programme de sécurité ambitieux mais réaliste pour le format, qui complète – et ne concurrence pas – les institutions et organisations existantes.

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