De la guerre en Bosnie à Dayton et la paix progressive

Nouveau rapport par Carl Bildt sur les leçons des accords de paix de Dayton, 25ans plus tard

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  • La communauté internationale n’était pas préparée pour les conflits qui ont suivi la dissolution de la Yougoslavie. Elle a en particulier négligé la Bosnie.
  • L’Europe ne pouvait à elle seule apporter la paix, l’action américaine a été lente mais décisive et la Russie a été un acteur important.
  • La guerre en Bosnie a duré des années de plus que ce qu’elle aurait dû, davantage à cause des divisions entre les puissances extérieures qu’à cause de celles au sein du pays et de la région elles-mêmes.
  • Les fondamentaux des accords de Dayton de 1995 étaient similaires à ce qui avait été discuté, mais n’ont pas été menés à terme, avant que la guerre n’éclate.
  • Après la guerre, de nombreux dirigeants politiques en Bosnie ont perçu la paix comme une continuation de la guerre par d’autres moyens, ce qui a sérieusement entravé le progrès économique et social.
  • Pour conclure, il sera difficile de maintenir le progrès de la Bosnie et de la région sans un processus d’adhésion à l’Union européenne clair et crédible.

Les accords de paix sont chose rare. La plupart des conflits se terminent soit par la victoire d’une des parties, ou bien par un quelconque cessez-le-feu rarement suivi par de véritables accords de paix. Pourtant, il y a 25 ans, le conflit le plus douloureux ayant eu lieu sur le sol européen depuis la Seconde guerre mondiale s’est terminé par un accord de paix.

Les accords de paix de Dayton sont plutôt uniques dans l’histoire européenne récente. Aujourd’hui, nous voyons avec quelle facilité des conflits gelés tels que celui du Haut-Karabakh peuvent reprendre ; et même dans leur état de gel, ils continuent à générer des problèmes majeurs.

Que nous enseignent les accords de Dayton, 25 ans plus tard ? Dans son dernier rapport, « De la guerre en Bosnie à Dayton et la paix progressive », Carl Bildt, co-président de l’ECFR et ancien Premier ministre et ministre des Affaires étrangères de Suède, fait la rétrospective douloureuse de l’éclatement de la guerre en Bosnie (Yougoslavie), des années de conflit, jusqu’aux accords de Dayton, en passant par les différentes phases des efforts internationaux pour mettre en œuvre la paix, et le futur de l’intégration de la Bosnie à l’Union européenne.

Carl Bildt, co-président de l’ECFR, déclare :

« Un quart de siècle après Dayton, la paix est assurée, mais les réformes en Bosnie ont été beaucoup trop lentes et l’arène politique reste trop divisée. Le pays n’est pas encore sorti de l’ombre de la guerre, ni du système qui l’a précédée. »

En regardant vers l’avenir, il sera difficile de maintenir un progrès pour la Bosnie ou sa région sans un processus d’adhésion à l’Union européenne clair et crédible. C’est seulement dans le contexte d’un tel processus que les difficultés préexistantes entre les différents pays pourront être résolues, et c’est également seulement dans le cadre de ce processus que les réformes nécessaires pour promouvoir la croissance économique, l’Etat de droit, et la stabilité pourront être adoptées.   

Carl Bildt ajoute :

« Il y a un risque évident que l’attrait pour Bruxelles, qui est d’une importance cruciale pour la région et pour la Bosnie en particulier, se fragilisera à mesure que le processus d’adhésion se prolongera. La nouvelle approche pour ces négociations, entamée en 2020 après les objections françaises qui jugeaient le processus trop rapide, risquent de rendre ce problème encore plus sérieux. »

Une approche davantage tournée vers l’avenir de la part de l’Union européenne sur la réintégration et l’élargissement aurait également pu aider la Bosnie à progresser. Pourtant, pendant longtemps, les procédures d’élargissement de l’Union européenne se sont faites par rapport à des pays en particulier plutôt qu’avec une approche régionaliste. Ceci a sans aucun doute retardé la réintégration économique et la réconciliation politique qui auraient pu aider la Bosnie.

Carl Bildt poursuit :

« Pour de trop nombreux Bosniens, la paix a été une continuation de la guerre. Aucun dirigeant politique important n’a fait la démarche d’essayer de réduire les divisions – tous ont joué avant tout pour leurs propres nationalités. La phase de décisions internationales imposées a entrainé certains progrès mais a, en même temps, renforcé les tendances destructrices de la politique de ce pays. En fait, seuls les divers acteurs bosniens peuvent faire les compromis nécessaires pour permettre au pays d’avancer. Et, bien trop souvent, ils ont échoué dans cette voie. »

Mais la région – et particulièrement la Bosnie – demeure et demeurera une part importante de notre Europe. Quand les blessures de la guerre et de la dissolution auront enfin guéri, et que l’intégration sera vue comme naturelle par tous, il ne fait aucun doute que le pays aura le potentiel de contribuer à notre futur commun. 

L'ECFR ne prend pas de position collective. Les publications de l'ECFR ne représentent que les opinions de leurs auteurs.