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Emmanuel Macron va-t-il réussir à réformer l'Union européenne?

En visite d'Etat au Danemark, Emmanuel Macron a de nouveau tenté de convaincre du bien-fondé de ses réformes européennes. Mais comme depuis 15 mois, le Président peine à mobiliser ses homologues.

Thomas Liabot
Emmanuel Macron est en visite à Copenhague où il a invité à "réinventer l'Europe".
Emmanuel Macron est en visite à Copenhague où il a invité à "réinventer l'Europe". © Reuters

Comme il le fait régulièrement depuis 15 mois, Emmanuel Macron a tenté mardi de convaincre de la nécessité de "réinventer l'Europe", en visite au Danemark. Taxer les géants du numérique, organiser une solution coordonnée pour les migrants, harmoniser les régimes fiscaux : le président de la République est revenu sur les grands thèmes qu'il avait évoqués au cours de son discours de la Sorbonne en septembre dernier. Face à lui, le Premier ministre danois a mis en avant l'attachement de son pays à l'Europe, passant sous silence certaines de ses divergences (sur les réformes économiques et l'immigration notamment) avec Emmanuel Macron, qui paraît bien isolé pour porter ses réformes.

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Emmanuel Macron "est le seul leader en Europe aujourd'hui", estime François Heisbourg, président de l'IISS (International Institute for Strategic Studies), cité par l'AFP. Accueilli avec optimisme par les pro-Européens après le Brexit notamment, le président français a vu ses ambitions diluées dans l'inertie d'une union de pays aux intérêts souvent divergents. Depuis l'an dernier, "le monde a beaucoup changé avec la montée des nationalismes et la crise du multilatéralisme. Il faut être encore plus dynamique pour s'adapter à ces évolutions", reconnaissent des conseillers de l'Elysée.

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Une opposition frontale sur l'immigration

Au sein même de l'Europe, la Hongrie, la Pologne et l'Italie désormais mènent une politique eurosceptique et anti-migrants, qui oblige Paris à rechercher un "arc progressiste" pour les contrer. Mardi en visite à Milan, le Premier ministre hongrois Viktor Orban a d'ailleurs désigné Emmanuel Macron comme son adversaire sur ce dossier. "Il y a actuellement deux camps en Europe et l'un est dirigé par Macron", a-t-il expliqué. Face au groupe de Visegrád (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie) et à l'Italie, qui affichent la plus ferme opposition à l'accueil des migrants, la réponse tarde.

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Quand Macron a été élu, tout le monde a cru que la vague populiste allait reculer, qu'avec Merkel il allait former un tandem formidable auquel rien ne résisterait

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Dans ses projets de réforme de l'UE, Emmanuel Macron a longtemps pâti des déboires électoraux d'Angela Merkel, elle-même pas toujours sur la même longueur d'onde que son homologue français. Aujourd'hui, il doit aussi composer avec la coalition de la chancelière allemande, qui réduit sa marge de manoeuvre. Celle-ci est notamment sous pression sur les questions d'immigration. Fin juin, l'accord avec Angela Merkel sur le projet de budget commun de la zone euro cher au président français a également valu à la chancelière des critiques au sein même de son gouvernement.

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Malgré cet accord, la mise en application de ce projet sera complexe. D'abord, parce que le couple franco-allemand n'a pas fixé de montant ni de modalités de fonctionnement. Ensuite, parce que le projet devra être ratifié par tous les Etats membres de l'UE. Début mars, 8 pays - les Pays-Bas, l'Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Finlande, l'Irlande, le Danemark et la Suède - s'y étaient opposés dans un document commun. Fin juin, les 27 se sont entendus sur quelques avancées modestes pour réformer la zone euro, mais ont pour l'instant laissé de côté cette proposition.

Des divisions sur tous les projets

Les autres projets d'Emmanuel Macron ne seront pas plus simples à faire adopter. En juin, le Président a reçu l'appui de Berlin pour une harmonisation fiscale des entreprises et les deux pays souhaitent pousser pour un accord de l'UE concernant la fiscalité appliquée au secteur numérique pour la fin 2018. Mais comme sur chacun des sujets, les divergences entre Etats-membres ne sont jamais loin. L'Irlande et le Luxembourg ont déjà rejeté ce projet, craignant qu'une telle imposition au seul niveau européen ne mette en péril leur capacité à attirer les multinationales de ce secteur.

"Quand Macron a été élu, tout le monde a cru que la vague populiste allait reculer, qu'avec Merkel il allait former un tandem formidable auquel rien ne résisterait. Personne ne s'attendait à ce que le résultat électoral de Merkel soit si mauvais pour elle. Mais cela fait longtemps que le tandem franco-allemand ne suffit plus à entraîner toute l'Europe", explique auprès de l'AFP Manuel Lafont-Rapnouil, de l'European Council on Foreign Relations. Voici pourquoi Emmanuel Macron multiplie les visites à l'étranger. Il a déjà rendu visite à plus de la moitié de ses homologues européens et doit accueillir Angela Merkel à Paris en septembre.

Une nécessité alors que les élections européennes approchent et que l'opposition, à l'image de Jean-Luc Mélenchon, compte se servir du scrutin comme d'un "référendum anti-Macron". "Si on constate au milieu de 2019 qu'il n'y a pas moyen de faire avancer le mastodonte, il y aura un problème d'orientation stratégique de son quinquennat", avertit François Heisbourg. Dans ce contexte, Manuel Lafont-Rapnouil estime que le Président "a besoin de résultats et pas seulement d'ambitions pour arriver armé aux élections européennes."

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