En Espagne, la fin des majorités absolues et du bipartisme
Ensemble, conservateurs et socialistes n’atteignent pas la majorité.
- Publié le 08-05-2015 à 19h06
- Mis à jour le 09-05-2015 à 11h02
Nous constatons que Podemos (à gauche) a un plafond nettement moins élevé que ce que les enquêtes annonçaient juste après sa fondation, en janvier 2014", analyse pour "La Libre Belgique" José Ignacio Torreblanca, professeur de Sciences politiques à Madrid.
C’est ce qu’indique un sondage que le très sérieux Centre de recherches sociologiques (CIS) vient d’effectuer, au début de la campagne électorale pour les municipales et régionales (dans 13 des 17 régions). Podemos ne recueillerait ainsi plus que 16,5 % des intentions de vote.
Selon ce sondage, le Parti populaire (PP, conservateur) du Premier ministre Mariano Rajoy est en chute libre par rapport à sa victoire aux législatives de 2011 (44,5 %). Mais, avec 25,6 %, il se maintient comme première force du pays. Les socialistes du PSOE remporteraient 24,3 %. Et Podemos reste troisième.
L’autre parti émergent Ciudadanos (Citoyens) créé en Catalogne pour s’opposer aux indépendantistes atteindrait 13,8 %. Ce parti de centre-droit est la seule force encore montante.
Mais si au plus fort de la crise et du bipartisme PP/PSOE, certains suggéraient la formation d’une grande coalition à l’allemande, cela ne semble aujourd’hui ni imaginable ni possible. A deux, ces grands partis n’atteignent pas la majorité des intentions de vote. Les Espagnols se dirigent vers la fin des majorités absolues.
Le socialiste Felipe González, ancien chef de gouvernement, a ironisé : selon lui, il n’y aurait même pas de quoi créer "une petite coalition". Il voit, au contraire, à l’horizon, une Espagne "à l’italienne", avec des difficultés pour construire des majorités.
Podemos au centre ?
Podemos a présenté son programme en pensant aux législatives, plutôt qu’aux municipales. Une partie de ses militants sont surpris par la disparition de deux éléments qui semblaient constitutifs de son âme : on ne parle plus de revenu universel pour tous, ni d’effacement unilatéral de la dette du pays. Mais Podemos propose une augmentation des impôts pour ceux qui gagnent plus de 50 000 euros par an.
La récente démission de l’idéologue économique du jeune parti, Juan Carlos Monedero, pour une question de revenus "oubliés" et d’impôts payés trop tard, a aussi marqué un point négatif dans une ascension qui semblait inéluctable.
"Leur succès est dû surtout à la faillite des grands partis. Maintenant, on va avoir un système de quatre partis, où Podemos essaie d’être socialement transversal, avec un discours qui reste surtout adressé aux perdants de la crise" , nuance Torreblanca. Et d’ajouter : "Attention, ils peuvent chercher aussi des votes solidaires parmi les classes moyennes, mais ils restent plus actifs que les autres dans la génération numérique sans emploi et parmi les jeunes urbains les plus mobilisés. Ils gardent une vraie base sociale."