Des superpuissances climatiques : comment l’UE et la Chine peuvent rivaliser et coopérer pour un avenir vert

Un nouveau rapport appelle les dirigeants européens à repenser leur approche à la Chine en ce qui concerne le plus grand défi auquel le monde doit faire face : l’urgence climatique

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  • Un nouveau rapport appelle les dirigeants européens à repenser leur approche à la Chine en ce qui concerne le plus grand défi auquel le monde doit faire face :  l’urgence climatique.
  • Les experts de l’ECFR et de l’E3G affirment que l’option du « partenariat », préférée jusque-là par les diplomates européens ne reflète plus la véritable complexité des interactions de l’Union européenne (UE) avec la Chine, première émettrice de gaz à effet de serre au monde.
  • La relation entre l’Europe et la Chine est de plus en plus marquée par de la compétition, aussi bien sur les questions climatiques que dans d’autres domaines.
  • Afin de répondre à cette nouvelle réalité, l’UE et ses Etats membres doivent établir de nouvelles références et lignes rouges pour une action climatique crédible, pour créer un cadre dans lequel la coopération entre l’Europe et la Chine peut se développer, y compris en ce qui concerne la finance durable.
  • En même temps, l’UE devra investir pour sa compétitivité future, en particulier dans les technologies vertes, afin d’être capable de rivaliser avec la Chine pour les marchés, les normes et l’influence dans un monde à faible émission de carbone.

Dans un nouveau rapport, les co-auteurs Janka Oertel (ECFR), Jennifer Tollmann (E3G) et Byford Tsang (E3G) cartographient la dimension géopolitique de la discussion sur le climat et son impact sur les relations entre l’UE et la Chine. Ils affirment que la notion de « partenariat » ne reflète plus suffisamment la réalité des interactions de l’UE avec la Chine sur la lutte contre le changement climatique. Au contraire, l’Europe et la Chine rivalisent de plus en plus sur tout le spectre de leur relation. Cela est aussi valable pour la politique climatique, que les Européens ne pourront plus traiter comme une dimension éloignée des tendances géopolitiques et géoéconomiques plus larges.

Alors que l’UE et la Chine transforment rapidement leurs économies pour les aligner à leurs ambitieux objectifs climatiques, la compétition autour des technologies à faible émission de carbone, des parts de marché et des standards s’intensifiera. Si elle est correctement traitée, la compétition peut avoir des effets vertueux et entraîner des innovations en matière de technologies vertes. Dans le cas contraire, le risque de différends liés au commerce sur les produits et standards à faible émission de carbone grandira, ce qui pourrait mettre en danger les objectifs du Green Deal européen et les accords multilatéraux sur les engagements climatiques.

Les principales recommandations du rapport sont les suivantes :

  • Identifier des standards clairs pour une action climatique crédible par la Chine, y compris un appel à un moratoire sur l’investissement en charbon en Chine avec effet immédiat.
  • Conserver l’ouverture des marchés et la sécurité des chaines d’approvisionnement en créant des conditions de concurrence égales pour la relance post-Covid et la transition vers des économies neutres en carbone.
  • Etendre le dialogue transatlantique sur le climat afin de construire un espace pour l’innovation en technologies propres qui soutienne les entreprises et un engagement sectoriel pour une coopération sur les technologies vertes, y compris avec les partenaires clés de la région Indopacifique.
  • Promouvoir une Stratégie de connectivité européenne qui soit mondiale, durable et financièrement bien équipée.
  • Utiliser l’engagement existant entre l’UE et la Chine sur la finance durable comme levier pour développer une approche mondiale plus harmonisée envers la définition d’activités économiques durables.
  • Réduire la place des énergies fossiles dans la finance internationale : soutenir l’engagement de la BEI et de la BERD avec les banques publiques chinoises et les organismes de crédit à l’exportation en ce qui concerne les aides au développement et les crédits à l’exportation.
  • Construire les fondements européens pour intégrer les questions climatiques dans les formats de coopération et les dialogues de haut-niveau, y compris dans les domaines économiques et commerciaux.

La directrice du programme Asie, Janka Oertel, et co-autrice du rapport, affirme que « la Chine est indispensable pour la lutte contre le changement climatique, mais les dirigeants européens doivent être lucides sur la dimension de plus en plus compétitive de ce domaine. La question climatique n’est pas protégée de la rivalité géopolitique. Pour assurer la prospérité dans un monde à faible émission de carbone, l’Europe doit investir dans sa compétitivité :  sur la connectivité, dans la sphère numérique et dans les technologies vertes. »

Jennifer Tollmann (E2G) explique que « l’Europe doit sérieusement s’atteler à mettre le climat au cœur de ses relations avec les autres puissances, de la même façon qu’il est actuellement au cœur de sa stratégie de croissance. L’Europe sera de plus en plus en compétition avec la Chine sur l’économie verte émergente. En même temps, le climat reste un risque existentiel – à la fois pour l’UE et pour la Chine. La sécurité, la prospérité et la compétitivité climatiques de l’Europe dépendront d’un engagement réussi avec la Chine, ainsi qu’avec les autres grandes puissances, sur la lutte contre les obstacles à une transition verte. »

Byford Tsang (E3G) ajoute : « Alors que l’UE et la Chine se décarbonent, elles seront inévitablement en compétition pour les postes de cheffe de file dans les secteurs verts émergents. L’UE doit travailler avec la Chine pour établir les règles d’une transition climatique, tout en fixant des standards pour respecter l’esprit du Green Deal européen. La compétition ne devrait pas devenir un obstacle, mais plutôt mettre en valeur un cercle vertueux menant à davantage d’innovation pour un avenir neutre en carbone. »

L'ECFR ne prend pas de position collective. Les publications de l'ECFR ne représentent que les opinions de leurs auteurs.