Pourquoi le G7 ne réussit pas à s’accorder sur une réponse à la situation en Syrie

Le groupe n’a pas réussi à prendre de décision concernant des sanctions envers la Russie.

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Le groupe n’a pas réussi à prendre de décision concernant des sanctions envers la Russie.

La réunion d’aujourd’hui entre les ministres des Affaires étrangères du G7 qui s’est tenue à Lucques, en Italie, a eu une dynamique que personne n’aurait pu anticiper. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont insisté pour que le G7 déclare qu’il ne peut y avoir de solution à la crise syrienne si Bachar Al-Assad reste au pouvoir. Ils ont aussi tenté – et échoué – de convaincre leurs alliés de se ranger derrière des sanctions ciblées contre les dirigeants militaires russes pour avoir soutenu le régime criminel de Bachar Al-Assad.

Il y a seulement quelques jours, les Etats-Unis avaient annoncé qu’ils n’avaient plus aucun intérêt à renverser Assad. L’administration Trump avait signalé qu’elle n’était plus intéressée par des interventions humanitaires en général, et qu’elle se concentrait sur le maintien d’une bonne relation avec la Russie, ce que le président Trump avait régulièrement promis lors de sa campagne.

Mais après l’attaque chimique présumée de la part du régime d’Assad qui a tué 89 personnes dans la province d’Idlib, tout cela a changé. L’administration Trump a répondu avec force en attaquant la base syrienne incriminée avec 59 missiles de croisière Tomahawk. Les représentants de Donald Trump ont soutenu l’attaque en déclarant leur intention de protéger les innocents à travers le monde, et en lançant des salves rhétoriques à répétition contre la complicité russe dans les crimes syriens, ou son incapacité à les empêcher.

Ce revirement rapide a provoqué l’équivalent diplomatique d’un coup de fouet chez les alliés des Etats-Unis. Bien sûr, il existe une indignation généralisée contre le régime d’Assad et une grande frustration contre la Russie pour son action en Syrie. Mais pourquoi, pourraient se demander les alliés des Etats-Unis, cette attaque en particulier a-t-elle provoqué un tel revirement de la politique américaine ?

Bachar Al-Assad commet des crimes de guerre en Syrie avec une grande constance depuis plus de cinq ans. Des attaques chimiques ont eu lieu de manière intermittente, mais surtout des milliers et des milliers d’innocents sont morts par d’autres moyens. Donald Trump lui-même avait dénoncé l’idée d’intervenir après une attaque chimique bien plus mortelle en Syrie en 2013.

Et pourtant, de façon soudaine, quelques horribles photos de « beaux bébés » ont défait des années de prises de positions politiques. Cela témoigne d’un président américain qui est soit dangereusement réactif à des photos touchantes, soit simplement en train d’essayer de distraire l’attention de son public des derniers échecs de politique intérieure de sa présidence. Dans tous les cas, cela ne convaincra pas ses alliés qu’investir dans le nouveau zèle missionnaire de l’administration Trump contre Assad et la Russie sera payant. Après tout, quelle sera la prochaine horreur qui distraira Donald Trump ? Sera-t-il de nouveau le meilleur ami de Vladimir Poutine dans dix jours ?

Les sanctions envers la Russie coûtent cher, politiquement et économiquement, à nombre d’alliés du G7, en particulier à la France et à l’Italie. Le Royaume-Uni, plus lié aux Etats-Unis depuis sa décision sur le Brexit, s’est rallié plus rapidement. Mais les divisions signifient que le groupe n’a pas été capable de prendre une décision sur les sanctions, et qu’à la place une enquête sur la responsabilité de l’attaque chimique a été demandée. Or, appeler à une « enquête approfondie » est une façon consacrée de masquer des différences et de gagner du temps.

Indépendamment de ce que l’on pense de la Syrie ou de la Russie, les montagnes russes de la semaine dernière ont confirmé que la politique étrangère de Donald Trump est d’essence capricieuse et imprévisible. Donald Trump n’a aucune conviction profonde sur un grand nombre de questions de politique étrangère et aucun attachement aux notions de constance et de cohérence. Il ira là où ses lubies et les politiques du moment le porteront.

Finalement, les Etats-Unis se retrouvent avec une politique qui reflète un amalgame étrange de ses humeurs, des derniers titres des informations télévisées et du dernier conseiller auquel il a parlé. Tout effort pour imposer une doctrine cohérente sur la politique de Donald Trump en Syrie, par exemple, est donc condamnée à échouer sous le poids de ses propres contradictions. Ce sera une folle épopée – et tout ce que les alliés peuvent faire, c’est s’accrocher pour leur survie.

Ce commentaire a d’abord été publié dans le Telegraph le 11 avril 2017. 

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