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Monde - Défense

Autonomie stratégique : l’UE se dote d’une boussole mais se perd en fausses querelles

Autonomie stratégique : l’UE se dote d’une boussole mais se perd en fausses querelles

Un officier canadien de l’OTAN en Irak. Sabah Arar/AFP

Le désengagement américain et les difficultés posées par le comportement belliqueux de la Turquie secouent l’OTAN et incitent les Européens à se doter de capacités d’action pour défendre leurs intérêts de manière autonome, mais les querelles intestines sapent leur crédibilité, déplorent diplomates et analystes.

L’Alliance atlantique et l’Union européenne ont entrepris, chacune de son côté, de s’adapter à la nouvelle donne mondiale. Qui sont les ennemis, les partenaires ? Quelles sont les menaces ? Quels sont les moyens, les manques, les vulnérabilités ?

Les Européens ont lancé l’exercice la semaine dernière. Leurs services de renseignements civils et militaires ont dressé un état des lieux dans un document classifié. Cette « boussole stratégique » doit permettre à l’UE de « gérer des crises » et pour cela de « réduire sa dépendance », de se doter de « capacités » et de définir des « partenariats ».

L’OTAN s’est livrée au même exercice après la violente charge du président français Emmanuel Macron contre une organisation en état de « mort cérébrale ». Une réflexion menée par un groupe de sages vient de rendre son rapport. Elle sera discutée par les ministres des Affaires étrangères de l’OTAN lors d’une visioconférence mardi et mercredi et le patron de l’Alliance, le Norvégien Jens Stoltenberg, soumettra des propositions en février 2021.

Mais les dissensions, les désaccords, les rivalités entre Européens et entre alliés minent les deux démarches.

Les États-Unis, qui ont décidé de manière unilatérale de se désengager d’Afghanistan, d’Irak et de certaines parties d’Europe pour la fin de l’année sont-ils toujours un allié fiable ? demande la ministre de la Défense allemande Annegret Kramp-Karrenbauer. La Turquie, qui ne respecte plus les règles de l’Alliance, a-t-elle toujours sa place au sein de l’OTAN ? s’interroge le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian.

Les alliés vont en débattre en décembre, mais ils devront attendre janvier 2021 pour les réponses du nouveau président américain Joe Biden.

Les Européens devront alors décider s’ils augmentent leurs participations au sein des missions de l’OTAN en Afghanistan et en Irak, ou s’ils abandonnent ces pays.

Des « choix difficiles » devront être faits, a averti Jens Stoltenberg. Or les Européens ne font pas front uni, ni au sein de l’UE ni à l’OTAN. Le désaccord le plus flagrant oppose la France et l’Allemagne.

Paris et Berlin se sont affrontés à la mi-novembre sur « l’autonomie stratégique », un concept expliqué comme la capacité pour les Européens d’agir de manière autonome.

« Les illusions d’autonomie stratégique doivent cesser », a lancé Annegret Kramp-Karrenbauer. Emmanuel Macron a dit son désaccord et déploré un « contresens historique » dans un long entretien à la revue Le Grand Continent. « Je n’ai pas entendu la chancelière dire que l’OTAN était superflue », lui a répondu la ministre.

Débats stériles

Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a déploré des « débats stériles, parfois théologiques » sur la nécessaire capacité de réagir de manière autonome face aux défis.

« Le président Macron a toujours dit que la défense européenne est complémentaire de l’OTAN. Le soupçonner de vouloir affaiblir l’OTAN est dangereux, quand cela est fait ouvertement », avertit la chercheuse allemande Ulrike Franke, collaboratrice de l’European Council on Foreign Relations (ECFR).

Spécialiste des questions de défense, l’eurodéputé français Arnaud Danjean déplore un « faux problème ». « Les dépendances des Européens sont énormes : drones missiles, capteurs, signal GPS (géo-positionnement par satellites) pour les armes téléguidées et même dans le domaine spatial, où il leur faut mieux s’organiser pour éviter de se faire tailler des croupières », souligne-t-il. « Il faut regarder la hiérarchisation des priorités sécuritaires. Tout le monde sait que le cœur de l’OTAN, c’est son rôle sur le front Est, face à la Russie », soutient-il. « La politique européenne de défense, c’est plutôt de la gestion de crise, et elle se fera sur le front Sud, dans des régions qui ne sont plus des priorités pour les États-Unis », explique-t-il. « Il faut avoir une vraie autonomie européenne sur le flanc Sud, car les décisions à l’OTAN sont prises à l’unanimité et la Turquie pose un problème, car elle paralyse l’Alliance en s’opposant à certaines opérations dans cette région, notamment en Libye », plaide-t-il.

« La France et l’Allemagne devraient cesser les faux débats et se concentrer sur ce qu’elles ont en commun : le désir de construire plus de capacités européennes », conseille Ulrike Franke.

Source : AFP

Le désengagement américain et les difficultés posées par le comportement belliqueux de la Turquie secouent l’OTAN et incitent les Européens à se doter de capacités d’action pour défendre leurs intérêts de manière autonome, mais les querelles intestines sapent leur crédibilité, déplorent diplomates et analystes.L’Alliance atlantique et l’Union européenne ont entrepris,...

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