Sur les 193 pays membres que comptent les Nations unies, 126 ont signé lundi la déclaration politique des Etats-Unis engageant l'institution à se réformer. Un petit succès pour Donald Trump, qui a agrémenté l'événement d'un court discours au côté du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.

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La photo n'est pas trompeuse, les deux hommes souhaitent revoir le fonctionnement du "machin", selon le célèbre mot du général De Gaulle. Mieux, ils sont d'accord sur certains points, même si Trump exprime ceux-ci plus crûment. "Au cours des dernières années, les Nations unies n'ont pas atteint leur plein potentiel à cause de la bureaucratie et d'une mauvaise gestion, a déclaré le milliardaire. L'ONU doit se concentrer plus sur les gens et moins sur la bureaucratie."

Antonio Guterres ne peut qu'être d'accord. Dans la droite ligne des critiques qu'il formulait lorsqu'il se trouvait à la tête du Haut-Commissariat aux réfugiés, de 2005 à 2015, l'ancien Premier ministre portugais a défendu en juillet une ONU du XXIe siècle qui se concentre "plus sur les gens et moins sur la marche à suivre, plus sur les résultats pour les plus pauvres et les exclus et moins sur la bureaucratie".

Unilatéralisme contre multilatéralisme

Derrière de grands principes, les divergences sont pourtant nombreuses entre le président et le secrétaire général. Le premier s'est fait le chantre de l'unilatéralisme et du "deal", quand le second défend logiquement le multilatéralisme, au fondement de son institution. Trump souhaite des réformes structurelles pour baisser la contribution américaine aux différents budgets onusiens, quand Guterres n'a qu'une seule fin, celle d'une plus grande efficacité et d'une plus grande souplesse.

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Avant Trump, d'autres présidents américains ont dénoncé la dépendance trop grande de l'ONU à l'apport américain, exigeant en conséquence une réforme. L'antienne avait déjà été invoquée par George W. Bush. Ce dernier avait même nommé un temps comme ambassadeur John Bolton, qui avait publiquement assuré que "les Nations unies n'existent pas". Le même John Bolton a conseillé Trump, jusqu'au départ du sulfureux Steve Bannon en août.

Faiblesse, incompétence et bavardages

Avant de mettre un peu d'eau dans son soda, Donald Trump avait ainsi décrit sur Twitter l'ONU comme "un club où les gens se rassemblent, bavardent et passent du bon temps".

Lors de sa campagne, il avait fustigé "la totale faiblesse et incompétence" de l'institution, promettant la baisse de la contribution américaine à son budget - 28,5% des 7,3 milliards du budget opérations de la paix et 22% des 5,4 milliards de ses crédits de fonctionnement.

Joignant les actes à la parole de son supérieur, l'ambassadrice américaine auprès de l'ONU Nikki Haley se réjouissait ainsi en juin de la réduction d'un demi-milliard de dollars du budget des opérations de la paix. Elle avait même ajouté que ce n'était "que le début". Derrière cet autre succès trumpien à l'ONU se cache cependant des fins ou des changements de mission anticipés par Guterres.

Les exigences américaines viennent en effet croiser les économies identifiées par Guterres, notamment en ce qui concerne le parc aérien de l'ONU, dont il juge pouvoir améliorer la gestion. La technique qu'il adopte pour échanger avec Trump est d'ailleurs la même que celle d'Emmanuel Macron: "Trouver des compromis plutôt que multiplier les fronts", résume Manuel Lafont-Rapnouil, directeur du Conseil européen des relations internationales à Paris. Seul le temps dira si elle peut être payante.

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