Wiko mobile, fabricant de telephonie mobile WIKO

Comment inciter les jeunes diplômés à tenter leur chance dans les start-up? Réponse: distribuer des actions gratuites. Les bureaux de Wiko (téléphonie mobile), à Marseille.

© Jérôme Chatin/L'Expansion

"Revenir aux 39 heures en abaissant les cotisations sociales"

Hervé Morin, Député Nouveau Centre de l'Eure

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Zéro - Pointé - partout, balle au centre. La fameuse troisième voie, il y croit dur comme fer, Hervé Morin. Une troisième voie qui émergerait au centre, et non pas du côté de Marine Le Pen. Alors qu'il s'apprête à publier un essai, Lettre à Alma, dans lequel il dévoile sa vision de la France, l'ex-ministre de la Défense de Nicolas Sarkozy a passé tout son été à sillonner l'Hexagone pour faire entendre une autre musique. Sa nonchalance affichée cache à peine une ambition redoutable. "Notre modèle institutionnel, politique, économique et social est à bout de souffle. Il faut sortir de la paralysie de la Ve République. PS et UMP ont fait le choix de tirer la croissance française par la consommation à crédit, alors que nos concurrents ont pris le parti de la production. Il faut renverser la vapeur."

Et, dans les bouffées brûlantes de la réforme, revoilà la politique de l'offre, version XXL. Premier pilier de cette révolution : la liquidation des trente-cinq heures. Mais pas n'importe comment. "Il faut revenir aux trente-neuf heures de travail hebdomadaire sans augmenter le salaire brut. Mais, en abaissant les cotisations sociales payées par les salariés, on doit pouvoir augmenter le salaire net. Une façon de préserver le pouvoir d'achat", détaille le député de l'Eure.

Une proposition qui s'accompagne d'une orientation de la fiscalité en faveur de l'innovation: baisse du taux de l'impôt sur les sociétés à 15% sur les bénéfices réinvestis, diminution de l'impôt sur le revenu pour tout investissement jusqu'à 200 000 euros dans une start-up... Avec, en toile de fond, le retour de la TVA sociale, un coup de rabot de 80 milliards dans les dépenses publiques, et l'assouplissement du droit du travail.

La fausse bonne idée

La méthode Sapin de négociation avec les partenaires sociaux. Pour réformer le marché du travail, il faut "assiéger le Parlement" et, pourquoi pas, passer par la méthode des ordonnances.

"Décentraliser les négociations sociales dans l'entreprise"

Gilbert Cette, professeur d'économie, université d'Aix-Marseille

Gilbert Cette fait partie de ces économistes de l'offre qui ont l'oreille du président François Hollande. Expert des questions de productivité et de marché du travail, il préconise rien moins qu'un "big bang social". "La plus grande partie des négociations sociales devrait être décentralisée dans les entreprises", explique-t-il. Sa méthode conçue avec l'avocat Jacques Barthélemy pour faire avancer cette réforme très polémique, réclamée de longue date par le Medef ?

"Le gouvernement donnerait six mois aux partenaires sociaux pour définir ce à quoi on ne peut pas déroger dans le Code du travail et ce qui relève de l'ordre public social ou du droit international, comme le respect de la santé au travail ou de la limite absolue de quarante-huit heures de travail hebdomadaires." Tout le reste pourrait être négocié dans les entreprises, sous réserve d'un accord des organisations syndicales majoritaires. Cela permettrait, par exemple, d'adapter la durée du travail aux besoins des entreprises. "De nombreuses études montrent qu'une telle réforme augmenterait la productivité de 0,5 point par an pendant cinq ans.

La fausse bonne idée

Augmenter les impôts sur les hauts revenus. "Mettre en place un prélèvement confiscatoire ne ferait que freiner l'innovation : les plus créatifs n'investiraient plus."

"Démocratiser l'actionnariat salarié"

Olivier Mathiot, cofondateur de PriceMinister et président de France Digitale

Quand les mauvais chiffres du chômage sont tombés fin juin, Olivier Mathiot était à New York pour convaincre les Américains d'investir dans les pépites françaises. Au téléphone, il est comme une pile. "Le réflexe des jeunes diplômés, lorsqu'ils sortent des grandes écoles, est de chercher un job dans la fonction publique ou dans une société du CAC40. Or ce ne sont pas ces entreprises qui créent de l'emploi. Mais, alors, comment convaincre les jeunes de tenter leur chance dans les start-up ? L'"esprit Silicon Valley" ne suffit pas. Il faut démocratiser l'actionnariat salarié en attribuant aux jeunes embauchés des actions gratuites", plaide le président de France Digitale.

Problème : lors de cette attribution, la cotisation sociale que doit acquitter l'entreprise est de 30% de la valeur. Olivier Mathiot préconise donc de lever ces freins fiscaux. Les jeunes seraient incités à partager les gains futurs des startup... mais aussi les risques.

La fausse bonne idée

Supprimer l'ISF. "Il faudrait utiliser davantage la fiscalité pour encourager l'investissement dans l'économie réelle."

"Repenser le système de la formation professionnelle"

Édouard Tétreau, associé-gérant de Mediafin

Pour Édouard Tétreau, il existe en France un impôt sur les entreprises, socialement injuste, économiquement inefficace, et moralement intolérable : "C'est la formation professionnelle et ses 32 milliards d'euros prélevés chaque année par 50000 organismes cooptés dans l'entre-soi glauque de la cogestion à la française. A part les bénéficiaires de ces fromages républicains et quelques rares salariés du privé, personne ne profite de cette gabegie."

Sa proposition ? Plus un centime d'argent public ne doit être consacré à la formation de ceux qui ont déjà un travail. "La

formation professionnelle

doit être de la responsabilité exclusive des entreprises, qui savent autrement mieux que de surréalistes comités Théodule d'apparatchiks syndiqués les besoins de formation de leurs salariés."

Concrètement, Edouard Tétreau propose d'affecter 50% de la ressource aux 5 millions de demandeurs d'emploi en France et 50% aux entreprises qui embaucheront des étudiants en contrat d'apprentissage. "Pour gérer cet argent et animer ces formations et apprentissages, on mettra sur place une nouvelle cogestion entre, d'un côté, les entreprises privées et, de l'autre, les jeunes Français de moins de 25 ans." Au bout du chemin : plus d'emploi, plus de croissance et moins d'injustice.

La fausse bonne idée

Faire des économies sans stratégie. "Cela rapporterait à court terme de supprimer notre force de frappe nucléaire, nos hôpitaux... mais, à long terme, le prix à payer serait hors d'atteinte."

"Instaurer un Erasmus politique"

Érik Orsenna, romancier et académicien

Dans le plus pur style académicien. Le regard bien malicieux, l'"immortel" et romancier à succès Erik Orsenna affecte un air dégagé pour lâcher une véritable bombe : "La plupart des élus ne connaissent pas assez le monde et ignorent trop souvent l'entreprise. Ils devraient donc avant tout exercice de mandat électif passer un an à l'étranger et un an dans une société privée. Cette obligation vaudrait pour les députés, les sénateurs et le président de la République."

Avant l'Elysée, un stage dans une PME. Avant l'Assemblée, un séjour à Londres ou à Berlin. Evidemment, l'ancienne plume de François Mitterrand ne se fait pas trop d'idées sur la réalisation de sa proposition. Pourtant, de nombreux rapports soulignent la déconnexion de l'élite politique avec le monde de l'entreprise. Selon une étude publiée en décembre 2013 par le think tank En temps réel, seulement un quart des députés de gauche viennent directement du monde de l'entreprise (cadres, ingénieurs, chefs d'entreprise et employés). A droite, la proportion atteint péniblement 36%.

Mais Erik Orsenna imagine une sorte d'obligation réciproque : "Avant l'augmentation de leur rémunération, les dirigeants des grandes entreprises devraient passer quelques journées dans une permanence parlementaire pour voir de plus près la détresse de la population."

La fausse bonne idée

Faire une loi de simplification. "C'est une contradiction dans les termes. Même simplificatrices, de nouvelles lois et circulaires compliquent la vie."

"Diviser par deux le taux d'IS en supprimant les crédits d'impôt"

Philippe Askenazy, directeur de recherche CNRS-Ecole d'économie de Paris

"Le système le plus stupide du monde": c'est ainsi que cet économiste du travail qualifie la fiscalité des entreprises à la française. "Nous avons un taux facial d'impôt sur les sociétés parmi les plus élevés de tous les pays européens. Cela pousse les multinationales à localiser leurs profits à l'étranger et fait perdre au moins 5 milliards d'euros par an à l'Etat, selon les résultats de travaux à paraître prochainement. Or, parallèlement, elles touchent des crédits d'impôt : CICE, crédit impôt recherche, etc.", constate le cofondateur du collectif des Economistes atterrés.

Un système totalement illisible vu de l'étranger, et d'autant plus injuste qu'il profite surtout aux grandes entreprises, "seules en capacité de maîtriser toutes les techniques d'optimisation fiscale". A réformer d'urgence, donc : " A recettes fiscales constantes, la suppression des crédits d'impôt permettrait de pratiquement diviser par deux le taux d'IS actuel. La France, qui n'arrive pas à promouvoir une autre politique européenne, s'alignerait ainsi sur les pratiques non coopératives britanniques ou allemandes, et améliorerait sa position dans la compétition internationale pour attirer les entreprises. Par ailleurs, cela profiterait aux petites et moyennes entreprises."

La fausse bonne idée

Supprimer ou suspendre les seuils sociaux. "L'Insee, entre autres, a montré depuis longtemps que les gains à en attendre, en termes d'emploi, seraient faibles. C'est typiquement un faux débat, lancé par le Medef pour éviter les vraies réformes, tout en donnant l'impression de s'occuper des problèmes des PME."

"Etablir des passerelles entre travail manuel et intellectuel"

Max Gallo, historien et académicien

Avant d'écrire des romans historiques, avant d'officier comme secrétaire d'Etat sous François Mitterrand, avant d'obtenir l'agrégation d'histoire, Max Gallo exerçait la profession de technicien à l'ORTF avec pour seul diplôme un CAP de mécanicien-ajusteur. Véritable tambour-major de l'intégration républicaine, il relève un gros problème dans le système méritocratique français.

"L'élite française considère le travail manuel comme humiliant et subalterne. Elle doit plutôt favoriser les passerelles entre le monde des cols bleus et celui des cols blancs. L'intégration sociale - en particulier pour les jeunes issus de l'immigration - y gagnera." La lutte contre le chômage des jeunes aussi. Pour preuve, les pays venus à bout de ce fléau mettent le paquet sur l'apprentissage et l'alternance. En Suisse, 50,4% des 15 à 19 ans travaillent, contre 10% des Français au même âge. De même, l'Allemagne forme tous les ans presque quatre fois plus d'apprentis que la France. "Il faut rendre la dignité à des métiers non valorisés. Après tout, il existe une élite de la mécanique et du bâtiment qui finit par créer d'elle-même des emplois", ajoute l'écrivain. Un ministre des Affaires sociales et de l'Emploi fit la même analyse en 1987. Il s'appelait Philippe Séguin, un républicain de la rive droite.

La fausse bonne idée

" Croire que l'efficacité de la formation professionnelle et de l'apprentissage repose uniquement sur les moyens financiers que l'Etat y consacre. C'est également une question de regard."

"Elargir les accords de maintien de l'emploi"

Frédéric Saint-Geours, président du Groupe des fédérations industrielles

Les dispositions de l'accord national interprofessionnel conclu en 2013 ? Beaucoup trop timides, aux yeux de l'ancien n°2 de PSA, Frédéric Saint-Geours, "Les conditions d'application sont tellement restrictives que seuls quatre accords ont été signés." L'idée prônée par le président du Groupe des fédérations industrielles ? Passer à des accords de maintien de l'emploi "offensifs".

Autrement dit, ces accords ne doivent pas être limités dans le temps et surtout ne peuvent pas seulement être destinés aux entreprises passant un cap difficile. "Il faudrait pouvoir les proposer au-delà de deux ans à des sociétés qui ont prévu d'investir un nouveau marché, procéder à une acquisition, ou développer une nouvelle technologie, et qui ont besoin pour cela de se projeter à moyen terme." Plus radical, "le salarié qui refuserait l'accord se verrait obligé de donner sa démission et ne pourrait pas faire l'objet d'un licenciement ", assène Frédéric Saint-Geours, qui entend mettre le sujet sur la table lors des prochaines négociations interprofessionnelles sur la modernisation du marché du travail. L'impact positif sur l'emploi serait, selon lui, immédiat.

La fausse bonne idée

Cibler les baisses de charges sociales uniquement sur les travailleurs les moins qualifiés. "Faire la course aux bas salaires avec d'autres pays moins chers que la France est une cause perdue d'avance."

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