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Comment l'Europe peut riposter aux mesures de « coercition » des Etats-Unis et de la Chine

Dans un rapport du Centre européen sur les relations internationales, industriels, banques et parlementaires promeuvent dix mesures pour permettre à l'Europe de répondre aux menaces économiques de ses partenaires. Il doit être débattu à Bruxelles et dans les Parlements nationaux.

Un groupe d'industriels et de politiques proposent dix mesures pour permettre à la Commission européenne de riposter aux menaces commerciales des Etats-Unis et de la Chine.
Un groupe d'industriels et de politiques proposent dix mesures pour permettre à la Commission européenne de riposter aux menaces commerciales des Etats-Unis et de la Chine. (Yves Herman/Reuters)

Par Anne Drif, Ninon Renaud

Publié le 21 oct. 2020 à 07:30Mis à jour le 21 oct. 2020 à 17:32

A quelques exceptions, ils préfèrent garder l'anonymat face aux risques de répliques ciblées. Mais pour la première fois, industriels, banques et parlementaires français et allemands se mobilisent pour réfléchir à des mesures de coercition contre les « agressions » des Etats-Unis et de la Chine visant les entreprises et les Etats européens.

L'interdiction du transfert de données entre l'Europe et les Etats-Unis, les maigres tentatives de contourner les sanctions contre l'Iran via Instex , ou la récente autorisation donnée aux Européens de riposter aux Américains dans le duel Boeing-Airbus, sont jugés insuffisants. Dans un rapport du Centre européen sur les relations internationales (ECFR ), « Protéger l'Europe de la coercition économique », publié ce mercredi, ils listent une série d'armes de dissuasion.

Signal important, les députés de la majorité en Allemagne et en France, Andreas Nick (CDU) et Stefan Rouenhoff (CDU) côté allemand, et Caroline Janvier et Raphaël Gauvain (LREM) côté français - auteur du projet de réforme de la loi de blocage -, ont décidé de faire partie de cette « task force » à l'origine des dix propositions.

Sanctions individuelles et blocage de transferts de bénéfices

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Celle-ci prône l'emploi d'un mécanisme de contre-sanctions en dernier recours. L'Europe peut prendre des contre-mesures si celles-ci répondent à un « fait illicite » du point de vue international, comme une « violation grave » de souveraineté. Dans ce cas, elle peut se fonder sur le droit d'exception à la sécurité de l'OMC.

Sa mise en oeuvre, une fois le principe adopté, ne nécessiterait pas de consensus à 27. « Quand l'Allemagne est menacée par la Chine de taxes si elle n'adopte pas Huawei ou par les Etats-Unis si elle poursuit sa participation au gazoduc Nord Stream 2, elle pourrait bénéficier de la protection de la Commission sous forme d'un relèvement des taxes en riposte », explique Jonathan Hackenbroich de l'ECFR.

La task force propose aussi la création d'une autorité européenne équivalente à l'Ofac américain chargé de l'application de sanctions. Les employés des sénateurs américains rédigeant les mesures contre des entreprises européennes ou les fonctionnaires chinois pourraient être ciblés. Des restrictions aux importations ou le blocage de transferts vers les Etats-Unis de bénéfices d'entreprises américaines seraient aussi possibles.

Pour garantir la souveraineté économique de l'UE, les auteurs du rapport prônent par ailleurs la création d'une banque européenne d'exportation dotée de représentants gouvernementaux de haut niveau, ainsi qu'un euro numérique. L'objectif est d'offrir des services de paiement pour contourner l'utilisation du dollar.

Soutien de l'exécutif franco-allemand

Ces propositions entrent dans la droite ligne de l'annonce du vice-président de la Commission européenne, Valdis Dombrovskis, en faveur d'un nouveau mécanisme collectif de protection européen face à ses partenaires commerciaux. Vendredi, Bruno Le Maire, partisan du droit de riposte européen dans le conflit entre Boeing et Airbus, a aussi envoyé un signal clair : « C'est un choix politique majeur, le choix politique est de savoir si nous restons impuissants face aux sanctions américaines. »

Au sein du gouvernement allemand, l'initiative a aussi le soutien des socio-démocrates. « Dans un monde où la concurrence entre grandes puissances s'intensifie, l'Europe doit représenter ses intérêts et ses valeurs avec plus de confiance et d'assurance vis-à-vis du monde extérieur », déclare au Handelsblatt le ministre des Affaires étrangères Heiko Maas.

L'UE n'est pas une grande puissance militaire, c'est précisément pour cela qu'elle doit utiliser son poids économique

Andreas nickDéputé de la CDU

Son homologue chrétien-démocrate, le ministre de l'Economie Peter Altmaier est plus prudent mais au sein même de la CDU, le soutien des élus à une approche plus offensive se renforce. « L'UE n'est pas une grande puissance militaire, c'est précisément pour cela qu'elle doit utiliser son poids économique », souligne Andreas Nick. La balle est désormais dans le camp de Bruxelles et des Parlements nationaux.

Anne Drif et Ninon Renaud (à Berlin)

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