Des dizaines de destroyers et de frégates croisent en formation autour d’un porte-avions, au large de l’île-province de Hainan, en mer de Chine méridionale. Puis surgissent les sous-marins, drapeaux rouges flottant sur les tourelles. Campé sur le pont du destroyer antimissile Changsha, le président chinois, Xi Jinping, face à une rangée de micros, en treillis militaire et casquette, gratifie d’un tonitruant « Salut à vous, camarades ! » chaque équipage au garde-à-vous.
En ce matin d’avril 2018, rien de tel qu’une parade navale géante, diffusée en direct sur la télévision chinoise, pour annoncer, comme l’a dit le commandant en chef des forces chinoises, qu’« aujourd’hui la marine chinoise s’est levée à l’est avec une toute nouvelle image ». Celle, en l’occurrence, d’une puissance navale dont les ambitions dépassent largement la défense de ses côtes et le contrôle des mers de Chine, pour englober la protection des intérêts chinois à l’étranger.
Signe des progrès fulgurants des dernières années, la moitié des quarante-huit navires de guerre qui défilèrent ce jour de printemps ont été mis en service à partir de 2012, l’année où Xi Jinping a accédé au poste de commandement suprême du Parti communiste chinois (PCC) et de l’armée.
C’est le cas du Liaoning, le premier porte-avions chinois, remodelé à partir d’un porte-avions soviétique acheté il y a des années à l’Ukraine, que ses missions ont depuis mené jusque dans le Pacifique. Il n’est déjà plus le seul : une dizaine de jours après la parade géante, le 23 avril, un deuxième porte-avions, entièrement fabriqué en Chine cette fois, mais toujours de modèle soviétique, avec une piste de décollage de type tremplin de saut à ski, faisait son premier voyage d’essai au large de Dalian, dans l’est de la Chine. Il vient de commencer, fin août, une croisière d’endurance de plusieurs mois.
« Un rattrapage que personne n’avait anticipé »
Le nombre de bâtiments est estimé à plus de trois cents. Si la Chine a toujours affiché des chiffres importants, c’est surtout la modernisation qualitative qui impressionne. « Ils ont effectué, sur le plan de la qualité, un rattrapage que personne n’avait anticipé. Les Américains disaient que [les Chinois] auraient toujours vingt ans de retard, ce n’est plus le cas. En combinant la modernisation avec le nombre, on peut dire aujourd’hui que c’est la deuxième marine du monde, devant la marine russe », estime l’historien de la marine Alexandre Sheldon-Duplaix, chercheur au service historique du ministère de la défense français.
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