En quelques déclarations sur Taïwan, Donald Trump a braqué les projecteurs sur une question qu’on pouvait croire résolue : celle du statut ambigu de Taïwan – officiellement la République de Chine –, dans une Asie que la Chine cherche à dominer toujours plus. Et vis-à-vis de laquelle un soutien américain durable semblait mis en doute après l’isolationnisme proféré par le candidat Trump.
Rien n’est simple sur Taïwan : la non-reconnaissance de la République de Chine par tous les grands pays – une vingtaine de petits Etats seulement entretiennent des relations diplomatiques avec elle – et son exclusion des instances onusiennes marginalisent cet Etat-nation souverain et démocratique de 23 millions d’habitants, 21e économie mondiale, que la Chine prétend rattacher, avec ses lois antisécession, à son territoire.
Taïwan, ou plutôt sa population, a d’autres ambitions, s’en tenant certes au « statu quo » – ni indépendance ni réunification –, faute de mieux, mais désireux d’un statut plus « normalisé » au sein de la communauté internationale, comme l’a laissé penser la victoire écrasante de la présidente Tsai et de son parti « indépendantiste » (selon les termes de Pékin) aux élections de janvier.
Fameuse ambiguïte
« Malgré la séparation de fait entre la Chine communiste et la République de Chine héritée de la guerre civile, et l’existence de l’Etat République de Chine, le discours politique, partout dans le monde, entretient la fiction d’une Chine unique. L’absence de double reconnaissance a créé un statu quo, résultat d’un rapport de force dominé par la Chine », souligne Mathieu Duchâtel, du Conseil européen des relations internationales.
Le Tweet de M. Trump confirmant qu’il avait pris au téléphone, le 2 décembre, la « présidente de Taïwan » a bousculé cette « illusion commode » qu’a été celle, lors de la décennie écoulée, de la paix dans le détroit de Formose. La déclaration à Fox News, le 11 décembre, du président élu – « Je ne vois pas en quoi nous devons être liés par une politique d’une seule Chine, à moins de conclure un accord avec la Chine sur d’autres choses, dont le commerce » – a rappelé aux Chinois que le « principe d’une seule Chine » n’engageait qu’eux.
Car, outre la fameuse ambiguïté du communiqué de Shanghaï de 1972 – dans lequel les Etats-Unis « prennent note » de la position chinoise –, Washington est garant d’une « détermination pacifique » du statut de Taïwan, grâce au Taiwan Relations Act voté par le Congrès en 1979 et aux Six Assurances de Ronald Reagan en 1982, tous deux scellant la pérennité de ventes d’armes et de relations diplomatiques de facto entre les Etats-Unis et Taïwan.
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