L’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République française offre à l’Union européenne (UE) l’opportunité de dépasser les conflits internes qui ont précipité sa désintégration. Plutôt que d’œuvrer exclusivement aux côtés des vieilles élites ou des nouveaux acteurs populistes, Macron a promis de rallier un large soutien politique sous la bannière d’une réforme de l’Europe. Mais pourra-t-il conférer un nouveau souffle à un projet en difficulté ?
Car si de nombreux dirigeants de l’UE ont été soulagés de voir Macron élu, c’est souvent parce qu’ils espèrent qu’il apportera un nouvel élan au vieux projet, plutôt qu’une rupture radicale par rapport au passé. Pour opérer un changement réel, Macron devra transcender ces deux modèles politiques à la fois contradictoires et complémentaires qui définissent la gouvernance de l’UE depuis une dizaine d’années : la technocratie et le populisme.
Au fil des années, les décisions de l’UE se sont déconnectées des politiques nationales pour être guidées tout autant par la logique institutionnelle de l’UE que par les intérêts des Etats membres. Elles sont aujourd’hui régies par des codes rigides auxquels les Etats membres sont tenus d’adhérer, même lorsque leur gouvernement ou leurs électeurs s’y refusent.
Explosion populiste
Ces tendances ont alimenté le sentiment que l’Europe est gouvernée par des élites peu préoccupées par les intérêts des citoyens qu’elles sont censées représenter, et qu’aucune autre forme de gouvernance n’est possible.
L’explosion populiste de ces dernières années est une réaction naturelle à cette forme de technocratie déconnectée
L’explosion populiste de ces dernières années est une réaction naturelle à cette forme de technocratie déconnectée. Ce n’est pas un hasard si Marine Le Pen en France, Geert Wilders aux Pays-Bas, Viktor Orban en Hongrie, Nigel Farage au Royaume-Uni, se sont tous présentés comme les représentants du « peuple ». Au moyen de leur outil politique favori qu’est le référendum, ils sont parvenus à porter préjudice au traité constitutionnel de l’UE, à l’accord d’association UE-Ukraine, aux conventions de rapatriement des réfugiés et, avec le Brexit, à la composition de l’UE elle-même.
Les négociations autour du Brexit se sont d’ores et déjà changées en champ de bataille entre technocrates et populistes, chaque camp luttant pour un dénouement susceptible d’appuyer son discours. Lorsque la première ministre britannique, Theresa May, a expliqué vouloir « faire du Brexit un succès », elle a déclenché l’alarme à Bruxelles, Paris et Berlin, dans la mesure où un tel « succès » pourrait donner des idées aux autres mouvements populistes anti-UE.
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