Spectacteurs et malgré tout perdants ? Tel est le risque encouru par les Européens face à la négociation commerciale en cours entre les Etats-Unis et la Chine. L’épreuve de force engagée par le président américain, Donald Trump, qui menaçait Pékin de taxes sur 50 milliards de dollars (42,5 milliards d’euros) de marchandises importées, a abouti à un armistice, annoncé le 19 mai. Une trêve conclue sur la promesse des Chinois d’acheter plus de produits américains, notamment agricoles et énergétiques, et de baisser leurs droits de douane sur les importations de voitures.
Jusqu’ici, les dommages semblent contenus pour l’Union européenne (UE), dont le marché automobile devrait profiter des annonces chinoises. Mais les pourparlers ne sont pas terminés. Le secrétaire américain au commerce, Wilbur Ross, doit se rendre à Pékin du samedi 2 au lundi 4 juin. Avec l’objectif plus ou moins affiché d’obtenir davantage de la Chine, alors qu’une partie du Congrès s’est émue de voir le géant asiatique s’en tirer à relativement bon compte. Selon le Financial Times, Washington cherche à sceller avec Pékin des contrats pluriannuels sur une série de produits.
« Il faudra juger si le futur accord présente un risque d’éviction pour l’UE sur le marché chinois, prévient un observateur avisé. Le danger, c’est que les Etats-Unis extraient sous la menace des concessions unilatérales qui se fassent au détriment des autres partenaires. » Une méthode contraire aux principes revendiqués par la Commission européenne en matière de libre-échange.
« Arriver à l’indépendance technologique »
Pour l’heure, si la Chine a promis d’acheter plus de biens américains, elle s’est refusée à tout objectif chiffré. « Mais il n’est pas dit que le deal final sera entièrement public », estime François Godement, directeur du programme Chine et Asie à l’European Council on Foreign Relations. De fait, un arrangement tenant du commerce administré serait irrégulier au regard des règles de l’Organisation mondiale du commerce.
L’accord préliminaire entre Washington et Pékin ne contient rien non plus de décisif sur ce qui constituait le cœur des récriminations américaines : les transferts forcés de technologies, le vol de propriété intellectuelle et l’avantage d’une industrie chinoise ultrasubventionnée. Des griefs cette fois partagés par l’Europe, qui n’aura pu que constater l’absence d’avancées sur ces dossiers.
De toute façon, malgré ses intérêts, l’UE dispose de marges de manœuvre quasi nulles pour intervenir dans la négociation. « Elle manque de leviers à la fois vis-à-vis des Etats-Unis et de la Chine, souligne M. Godement. Ils ne veulent pas de l’approche multilatérale qui est la sienne. »
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