Qu’ont en commun Matt Damon et Luc Besson ? Tous deux sont passés à Pékin début décembre. Le premier pour le lancement en grande pompe du dernier film dont il est le héros, Great Wall, de Zhang Yimou. La plus importante coproduction sino-américaine (150 millions de dollars) de Legendary depuis que le studio a été racheté par le géant chinois Wanda. Le réalisateur de Lucy, lui, est venu montrer à la presse chinoise des images exclusives de Valérian et la cité des mille planètes, son prochain film de science-fiction. Pour cette méga-coproduction de 200 millions de dollars, il soigne son partenaire chinois, Fundamental Films. Fondé par Mark Gao, venu de la bio-pharmacie, ce distributeur avait déjà cofinancé Valérian, avant de devenir, moyennant 60 millions d’euros, le deuxième actionnaire d’Europa Corp fin novembre.
Le cinéma « global » passe par la Chine, dont les 35 000 écrans forment la deuxième billetterie mondiale et peut-être bientôt la première. Les Américains réfléchissent depuis plus de deux ans aux « combinaisons gagnantes » pour pénétrer ce marché protégé. « Hollywood a d’abord cherché des coproducteurs en Chine pour rendre ses films “acceptables”, passer la censure et faire partie des 34 superproductions étrangères [depuis 2013] acceptées chaque année dans les salles », rappelle l’historien François Godement, directeur du programme Asie et Chine au Conseil européen des relations internationales (ECFR).
En Chine, certains films truffés d’éléments chinois ont raté leur sortie – comme The Warriors Gate, une coproduction entre Fundamental Films et Luc Besson, qui met en scène un joueur de jeux vidéo transporté dans la Chine ancienne. En revanche, Les Rives du pacifique et Warcraft, sans grand lien avec l’ex-empire du Milieu, y ont rapporté davantage qu’aux États-Unis, sauvant leurs producteurs du désastre. Mais le zèle d’Hollywood à incorporer des éléments chinois, ou l’inverse, peut irriter : l’idée que Matt Damon, dans Great Wall, joue un mercenaire britannique défendant l’empire chinois des barbares a piqué les milieux nationalistes en Chine. La version d’Iron Man 3, rallongée de 4 minutes de scènes avec des acteurs chinois, a agacé… mais rapporté gros.
Les Chinois vont désormais directement à Hollywood ou en Europe. Le pionnier, DMG Entertainment, s’est allié à Marvel et Disney dès 2012. Wanda, du magnat de l’immobilier Wang Jianlin, fait figure de leader incontesté : il détient aux Etats-Unis les réseaux de salles AMC, dont la fusion avec Carmike a été approuvée sous conditions mardi 20 décembre, Odeon & UCI en Europe, le producteur Legendary (Batman, Godzilla), et depuis peu la société productrice des Golden Globes. En Chine, Wanda gère 20 % des salles et ouvrira, en 2018, ses immenses studios de Qingdao aux tournages américains.
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