Sur le dossier iranien, en pleine crise sanitaire causée par la pandémie de Covid-19, la fracture diplomatique transatlantique continue de s’approfondir. Mardi 31 mars, le ministère allemand des affaires étrangères a annoncé que la structure Instex (acronyme anglais pour « instrument de soutien aux échanges commerciaux »), pensée par la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni pour continuer à commercer avec l’Iran malgré les sanctions américaines, a effectué, avec la République islamique, une première transaction portant sur du matériel médical.
Les observateurs opposés à la politique américaine de « pression maximale » contre l’Iran veulent y voir une percée importante et un succès pour la diplomatie européenne, au moment où les plus radicaux à Washington voient la crise sanitaire en cours comme une occasion de faire plier Téhéran. Cette transaction, qui intervient quatorze mois après la mise en place d’Instex, une structure longtemps considérée comme une coquille vide, reste toutefois symbolique.
« Fortes attentes politiques »
A Paris, le Quai d’Orsay a annoncé la poursuite de la coopération d’Instex et de son partenaire iranien STFI sur de nouvelles transactions. Selon les informations du Monde, l’échange porte sur des tests sanguins exportés par une entreprise allemande de droit privé pour un montant d’environ 500 000 euros. La transaction, prévue depuis novembre 2019, selon une source proche du dossier, a été accélérée au cours des dernières semaines. Il ne s’agit pas des équipements demandés officiellement par Téhéran pour faire face à la pandémie de Covid-19, qui continue à faire des ravages dans le pays, un des principaux foyers mondiaux.
Les résultats attendus restent loin des espoirs placés au départ par la partie iranienne dans le fonctionnement d’Instex. Mis sur pied début 2019, le mécanisme était officiellement censé permettre à l’Iran de continuer à profiter des avantages économiques associés à l’accord sur le nucléaire de 2015, malgré la décision unilatérale d’en sortir prise par l’administration américaine en 2018. La réticence des institutions financière européennes à s’associer au mécanisme, puis le renforcement des sanctions contre les exportations pétrolières iraniennes, ont sévèrement restreint le champ d’action d’Instex.
L’incapacité des Européens à garantir à l’Iran les dividendes économiques de ses concessions dans le dossier nucléaire a été présentée par Téhéran comme une raison pour la République islamique de s’affranchir de ses obligations au titre de l’accord de 2015, redonnant vie progressivement à son programme nucléaire. Face à cette escalade, les Européens ont lancé le mécanisme de résolution des conflits prévu par l’accord. Rien n’indique que le début des transactions ouvre la voie à une détente sur ce front. « Instex est entouré de fortes attentes politiques. Ce mécanisme ne va pas résoudre le contentieux sur le nucléaire, mais nous ne devons pas laisser cela occulter son utilité pour le commerce », estime Esfandyar Batmanghelidj, expert de l’économie iranienne et fondateur du site économique Bourse & Bazaar.
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