Chronique. Parmi les ambitions qu’elle a fixées à sa nouvelle équipe de commissaires européens, présentée mardi 10 septembre à Bruxelles, Ursula von der Leyen a cité celle d’« une Europe plus forte sur la scène internationale ». Plus forte ? Tremblez, prédateurs chinois, expansionnistes russes, disrupteurs trumpistes ! « Plus forte » ? C’est vrai qu’il y a de la marge, mais il était difficile de placer la barre moins haut ! S’il y a une chose que l’on ne pourra pas reprocher à la nouvelle présidente de la Commission, c’est de bomber le torse en jouant les matamores. « VDL », au fond, c’est l’antithèse de Trump.
Son futur collègue à la tête du Conseil européen, le Belge Charles Michel, s’est montré un peu plus explicite sur le sujet, début septembre, devant les diplomates de l’UE. L’Europe, leur a-t-il dit, « se doit d’agir avec audace et assurance » pour défendre « ses intérêts et ses valeurs » : « L’UE doit jouer un rôle de leader sur la scène mondiale. Si elle ne le fait pas, d’autres le feront. Et ils le feront dans leur intérêt, pas dans le nôtre. »
Il est possible que, en réalité, les deux têtes de l’exécutif européen, qui prendront leurs fonctions le 1er novembre, soient sur la même ligne sur le rôle de l’Europe dans le monde. Mme von der Leyen incarne sans doute la fameuse retenue allemande et le réalisme de la ministre de la défense qu’elle a été, dans un pays qui s’interdit toute référence à la puissance. Sa lettre de mission destinée à celui qui sera le prochain chef de la diplomatie européenne, l’Espagnol Josep Borrell, va un peu plus loin : la Commission von der Leyen se veut une « Commission géopolitique », pour que l’UE agisse de manière plus « stratégique ».
La présidente confie également à M. Borrell la responsabilité d’un groupe de travail sur « une Europe plus forte dans le monde » qui réunira tous les commissaires dont le portefeuille a un impact sur l’action extérieure de l’UE. Elle évoque l’objectif d’une « véritable Union européenne de la défense » et demande que les « instruments financiers extérieurs » de l’UE soient utilisés stratégiquement, pour « contribuer à nos objectifs politiques plus larges ».
Une nette prise de conscience
Ce n’est pas encore la révolution de l’Europe-puissance ni même les envolées lyriques macroniennes, mais il se passe quelque chose dans la tête des Européens. Une étude d’opinion commandée à l’institut YouGov par le think tank paneuropéen ECFR (European Council on Foreign Relations), publiée mardi, révèle une remarquable évolution à cet égard : les réponses des 60 000 personnes interrogées dans 14 pays traduisent une nette prise de conscience des bouleversements géopolitiques de ces dernières années et de la nécessité pour l’Europe d’être davantage maîtresse de son destin.
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