En cas d'élection de François Hollande le 6 mai, un clash avec l'Allemagne devrait pouvoir être évité. Tel est le principal enseignement d'une conférence organisée à Berlin le 26 avril par un centre de réflexions européen, l'European Council on Foreign Relations (ECFR) et la fondation Mercator.
Parmi les participants, les députés européens Daniel Cohn-Bendit et Sylvie Goulard, le député allemand JohannWadephul (CDU), le secrétaire d'Etat allemand aux affaires européennes Michael Link et Jean-Louis Bianco, chargé des "grandes orientations" internationales dans l'équipe du candidat socialiste. Celui-ci a repris les propos tenus la veille par François Hollande lors de sa conférence de presse.
Au lendemain du scrutin, en cas de victoire, il adressera un mémorandum à tous les chefs d'Etat et de gouvernement sur la renégociation du traité budgétaire conclu entre vingt-cinq des Etats européens. Ce mémorandum, destiné à permettre une relance de la croissance dans l'Union, comportera quatre points. D'abord la création d'euro-obligations, "non pas pour mutualiser les dettes, mais pour financer des projets industriels d'infrastructures dont les Etats détermineront l'ampleur". Deuxième point : l'augmentation "de possibilités de financement de la Banque européenne d'investissement (BEI), de façon à ce qu'un certain nombre de grands dossiers qui sont déjà connus de cette banque puissent être financés".
Troisième point : "la création d'une taxe sur les transactions financières, avec les Etats qui en décideront". Enfin, la mobilisation de "tous les reliquats des fonds structurels européens aujourd'hui inutilisés pour permettre d'accompagner là encore un certain nombre de projets venant des Etats et qui auront des retombées sur les entreprises".
Si le gouvernement allemand reste hostile aux euro-bonds, les trois autres points peuvent obtenir son aval. "Mieux utiliser la BEI qui est une belle endormie, oui", a dit Michael Link. Depuis plusieurs mois, les Européens discutent d'une possible augmentation de capital de la banque de l'Union européenne dont un Allemand, Werner Hoyer, prédécesseur de Michael Link aux affaires étrangères, a d'ailleurs pris la présidence en janvier.
"PACT SUNT SERVANDA"
"Utiliser les fonds structurels inutilisés, oui" a poursuivi Michael Link. Officiellement le gouvernement allemand est favorable à une taxe sur les transactions financières si l'ensemble des pays de la zone euro la mettent en place. François Hollande souhaite l'instaurer sans attendre un très hypothétique feu vert de Londres et il est vraisemblable qu'il souhaite taxer davantage de produits financiers que les Allemands, qui verraient bien cette taxe s'apparenter à un simple impôt de bourse.
Reste donc les euro-obligations auxquelles est opposé Berlin "pour des raisons juridiques, politiques et économiques". Mais la définition de François Hollande correspond en fait à des "project-bonds", or ceux-ci ne sont pas mal perçus par le gouvernement allemand. Celui-ci a d'ailleurs accepté que ces obligations soient évoquées lors du dernier conseil européen.
Berlin est en revanche opposé à ce que la France conditionne la ratification du pacte budgétaire à la mise en place de ce mémorandum. " Pacta sunt servanda " (les traités doivent être respectés ), ont martelé les Allemands. Dans un entretien au groupe de presse régionale WAZ, vendredi, la chancelière allemande Angela Merkel a réaffirmé que, à ses yeux, le pacte "n'est pas négociable".
Manifestement, l'équipe de François Hollande a choisi quatre points sur lesquels un accord lui parait envisageable assez facilement. " Il est primordial de redonner de l'espoir aux Européens " a justifié Jean-Louis Bianco qui a également jugé - là aussi en accord avec Michael Link - qu'il était temps de mettre fin à une sorte de directoire franco-allemand pour revenir à une méthode communautaire qui ne laisse pas les autres pays à l'écart.
Une fois un accord sur ces quatre points, l'entourage du candidat socialiste entend passer à des dossiers plus délicats : les euro-obligations, l'octroi d'une licence bancaire au mécanisme européen de stabilité et l'élaboration d'un véritable traité social européen.
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