Algérie: la manœuvre du pouvoir échoue à calmer le «dégagisme»
Les appels à manifester se multiplient et les critiques traversent tous les secteurs de l'opinion algérienne, qui a vécu la proposition de différer la présidentielle comme un nouveau stratagème de ses dirigeants.
À Alger
«Non à la prolongation du quatrième mandat!», lisait-on mardi sur les pancartes des manifestants à Alger, majoritairement des étudiants, pendant que des employés de sociétés privées et publiques maintenaient des sit-in, que les universités poursuivaient les assemblées générales de protestation et que de nouveaux appels à manifester vendredi 15 mars circulaient sur les réseaux sociaux.
L'offre d'Abdelaziz Bouteflika, contenue dans une lettre lue en son nom lundi 11 mars, n'a visiblement pas convaincu l'opinion. «Prolongation du quatrième mandat avec un gouvernement dirigé par les hommes du cinquième mandat. Le régime s'offre un sursis non prévu par la Constitution. Le mouvement populaire ne doit pas baisser la garde», s'inquiétait l'éditorialiste Saïd Djaffar, dans un tweet résumant l'état d'esprit d'une population déçue par la énième manœuvre du système.
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«Ce n'est ni le président de la République, ni personne, qui décide de la tenue de la présidentielle, c'est la Constitution. Et la Constitution, c'est la volonté du peuple», martèle, dans une intervention sur un média local la constitutionnaliste Fatiha Benabou.
« Le président révèle, explicitement dans le premier et implicitement dans le second message, qu'il est sous l'influence de forces occultes et qu'il n'est pas le seul maître de ses décisions »
Ali Benflis
Ces propositions hors cadre légal portent, selon l'opposant Ali Benflis, ex-chef de gouvernement, l'empreinte des «forces extra-constitutionnelles»: «Le président révèle, explicitement dans le premier et implicitement dans le second (message, NDLR), qu'il est sous l'influence de forces occultes et qu'il n'est pas le seul maître de ses décisions.» Pour Benflis, le peuple algérien «se voit mis devant le fait accompli d'une prorogation illégitime et inconstitutionnelle du mandat présidentiel en cours».
Les islamistes du MSP ont réagi en deux temps: après avoir salué dans la matinée l'annonce présidentielle, le parti s'est rattrapé, après une vague de critiques sur les réseaux sociaux, pour dénoncer le «contournement de la volonté du peuple».
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La réaction de Macron critiquée
Mais les critiques ne ciblent pas uniquement le pouvoir algérien. La réaction de Paris, jugée trop prompte par certains opposants, a été durement commentée. Mardi, Emmanuel Macron a salué la décision du président Bouteflika comme «une nouvelle page dans le développement de la démocratie algérienne». «Les déclarations de soutien empressées du ministre des Affaires étrangères de la France à la feuille de route du chef de l'État ne peuvent susciter que de l'inquiétude», dénonçait mardi le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, opposition laïque). «C'est lui aussi, Jean-Yves Le Drian, qui déclarait en février dernier sur un ton méprisant que l'élection (en République démocratique du Congo, NDLR) s'était finalement achevée par une espèce de compromis à l'africaine».
Andrew Lebovich, de l'European Council on Foreign Relations (ECFR), a aussi commenté ces paroles diplomatiques: «La position du président Macron est déjà dépassée dans la rue algérienne. Il est clair que les manifestants ne vont pas accepter cette transition, ils ont déjà changé leurs slogans. Le “Pas de cinquième mandat” s'est transformé en “Pas une minute de plus!”.»
ton nom
le
Il n' y a aucun autre parti donc pas d'opposition.
Seuls les religieux sont en mesure de s'organiser pour créer une opposition à l'armée.
label rouge
le
Le "peuple" algérien , toujours très efficace lorsqu'il s'agit de degagisme en effet.
ton nom
le
Le démocrate que je suis affirme qu'il s'agit d'un coup d'état.
Mais de qui ? L'armée! Cela dit, si Boutefliqua n'est pas remplacer par une personne décidé à relancer l'économie et calmer la corruption, L'armée verra de nouvelle manifestation et son pouvoir remis en cause. Un printemps arabe en Algérie aurait des répercussions géopolitiques très importantes et relancerait l'islamisme et la guerre civile.