Annoncée comme jouée d’avance, l’élection présidentielle polonaise a donné lieu à deux coups de théâtre. D’après des résultats censés être confirmés le soir du lundi 11 mai, le président sortant, Bronislaw Komorowski, arrive en seconde position, avec 33,1 % des voix.

Ce candidat indépendant mais proche de la Plate-forme civique (PO), le parti de centre droit de la première ministre Ewa Kopacz, pensait soit l’emporter dès le premier tour, soit occuper la place du favori au deuxième, le 24 mai.

Mais Andrzej Duda, qui se présentait sous les couleurs du parti de la droite réactionnaire et antieuropéenne Droit et Justice (PiS), l’a devancé avec 34,5 % des voix.

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La seconde surprise tient à la première : la percée d’un chanteur de rock, Pawel Kukiz, avec 20,5 % des suffrages. Tenant à sa position « anti-système », il a déjà prévenu qu’il ne donnerait pas de consigne de vote.

« C’est une surprise pour tout le monde, indique Piotr Buras, directeur du bureau de Varsovie du Conseil européen pour les relations étrangères. Certes, Bronislaw Komorowksi n’est pas très haut en couleur, mais il a été un bon président. Et Andrzej Duda vient de nulle part. »

Le président sortant s’est lancé tard dans la campagne, confiant dans une victoire face à un Andrzej Duda peu charismatique et dont la candidature avait surtout pour but de protéger d’une défaite le chef du PiS, Jaroslaw Kaczynski, premier ministre de 2006 à 2007.

Si les prérogatives du président polonais sont limitées à la politique étrangère et à la défense, son élection a néanmoins valeur d’indice à l’approche des élections législatives, prévues à l’automne.

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Des électeur fatigués par des face-à-face stériles

Dans cette perspective, Bronislaw Komorowski a interprété sa déroute comme un « sérieux avertissement ». Andrzej Duda a de son côté promis la « rénovation » de la Pologne dans les domaines de la santé, de l’économie ou de l’éducation.

La possibilité d’un retour au pouvoir du PiS alimente l’inquiétude d’un repli de la Pologne au sein d’une partie de l’électorat. « Je ne leur fais pas confiance, dit Agnieszka, électrice d’une quarantaine d’années. Ils feront primer les règlements de compte avec les anciens communistes sur le reste. »

Andrzej Duda et Bronislaw Komorowksi devront compter avec la lassitude des électeurs : le taux de participation s’élève à 49,4 %, contre 55 % il y a cinq ans. Seul Pawel Kukiz en a profité. « C’est le véritable vainqueur, indique Piotr Buras. Les électeurs sont fatigués du face-à-face stérile depuis dix ans entre la PO et le PiS. »