Le gouvernement israélien a rejeté la décision de la Cour de justice de l’Union européenne qui a validé, mardi 12 novembre, l’étiquetage des denrées alimentaires originaires de territoires occupés par l’État hébreu. Les États-Unis se sont dits « profondément préoccupés ».

La Croix : Quelle analyse faites-vous de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne ?

Hugh Lovatt : Il n’y a rien de surprenant dans cette décision, le droit international et les règlements de l’Union européenne étant très clairs sur la question. Le droit international ne reconnaît pas la souveraineté israélienne sur les territoires occupés.

En décembre 2016, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté la résolution 2334 exigeant l’arrêt des activités israéliennes de peuplement dans les territoires israéliens et affirmant ne reconnaître « aucune modification aux frontières du 4 juin 1967 », y compris en ce qui concerne Jérusalem, « autres que celles convenues par les parties par la voie de négociations ».

La controverse a été générée par les supporteurs des colonies israéliennes et le gouvernement israélien mais, contrairement à ce qu’ils affirment, cette décision ne vise pas Israël, mais seulement les denrées en provenance des territoires occupés. Comme l’a dit la Commission européenne, il ne s’agit pas d’un boycott ou de sanctions contre Israël.

Quel peut être son impact sur les États membres de l’Union européenne ?

H. L. : Trois pays avaient déjà leurs propres lignes directrices : le Danemark, la Belgique et le Royaume-Uni. À la demande des États membres, la Commission a publié en 2015 une notice interprétative sur l’indication d’origine des marchandises en provenance des Territoires occupés par Israël depuis juin 1967. L’ironie est que les États membres l’ont très peu appliqué depuis et ont laissé la Commission sous le feu des critiques du gouvernement israélien.

La décision de la Cour de justice de l’Union européenne va augmenter la pression sur certains États membres, notamment ceux de l’Europe de l’Ouest, qui pourront plus difficilement justifier de ne pas mettre en œuvre la réglementation européenne. Les États membres de l’Europe centrale et orientale, plus sceptiques, ont refusé jusque-là de l’appliquer. Hors de l’Union européenne, la justice doit aussi se prononcer sur la légalité de cet étiquetage au Canada.

Cet étiquetage va-t-il inciter au boycott d’Israël ?

H. L. : C’est la perception israélienne, relayée par l’administration américaine, mais elle ne correspond pas à la réalité. Les produits israéliens sont toujours vendus en Europe. Au Royaume-Uni, le commerce avec Israël a doublé depuis que l’étiquetage des produits en provenance des Territoires occupés est en vigueur. L’utilisation par l’Union européenne de sa capacité normative peut contribuer à alimenter un débat en Israël sur les coûts d’une annexion non reconnue par la communauté internationale.