Les Européens déçus de la réponse de l’UE à la crise sanitaire

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, et le président du Conseil européen, Charles Michel, à l'issue des négociations sur le plan de relance du 19 juin. [EPA-EFE | Olivier Hoslet/Pool]

D’après un sondage effectué récemment dans neuf États membres, la grande majorité des citoyens désapprouve les mesures prises par l’UE pour faire face à la crise liée au coronavirus et juge que la coopération doit être améliorée.

Lorsque les pays de l’UE ont commencé à se confiner, certains pensaient que la crise sanitaire allait renouveler la confiance du public dans les institutions gouvernementales et surtout souligner la nécessité d’une coopération européenne.

D’autres sont même allés jusqu’à prévoir un « moment hamiltonien » pour l’Union — une référence à l’un des pères fondateurs des États-Unis, Alexander Hamilton, qui a lancé l’idée de mutualisation de la dette publique après la guerre d’indépendance américaine.

Cependant, de nouvelles recherches du Conseil européen pour les relations internationales (ECFR) suggèrent que cet espoir pourrait rester un vœu pieux.

Selon une étude menée par Datapraxis et YouGov pendant la dernière semaine d’avril et la première semaine de mai auprès de 11 000 personnes dans neuf États membres, 46 % des Européens estiment que l’UE n’a pas été à la hauteur de ses responsabilités dans la lutte contre le coronavirus.

Dans certains pays, ce mécontentement est particulièrement marqué. 63 % des Italiens et 61 % des Français interrogés trouvent que l’UE a failli à la tâche. Et aucun État membre n’a enregistré une majorité de répondants satisfaits : le plus haut niveau d’approbation, qui se situe à 36 %, a été relevé au Portugal.

Les réponses à l’affirmation « l’UE s’est montrée à la hauteur durant la pandémie ».

Par ailleurs, de nombreuses personnes interrogées estiment que la réponse de l’UE à la crise n’était pas « pertinente ».

En France, 58 % des sondés se disent d’accord ou tout à fait d’accord avec cette affirmation. Ce chiffre s’élève à 52 % au Portugal.

Même si le sondage a été réalisé avant la création du fonds de relance de l’UE, Mark Leonard, le directeur de l’ECFR et l’un des coauteurs de l’étude, ne croit pas que le plan de sauvetage entraînera un changement d’opinion.

« C’est maintenant que la réponse de l’UE suscite des espoirs […]. Mais si cet espoir n’est pas nourri bientôt, nous pourrions tout aussi bien observer un retour de bâton », a-t-il déclaré à Euractiv Allemagne.

Toutefois, au-delà de l’opinion largement négative des citoyens sur la réponse à la pandémie, la majorité des personnes interrogées jugent que la crise démontre la nécessité d’accroître la coopération au sein de l’UE. C’est notamment le cas des sondés au Portugal, en Espagne ou en Italie, qui sont respectivement 90 %, 81 % et 77 % à appuyer cette idée.

Le plan de relance devrait investir 1600 milliards d’euros supplémentaires pour accomplir les objectifs climatiques

Selon des estimations, le plan de sauvetage européen à 750 milliards d’euros est loin d’être suffisant pour accomplir les objectifs de neutralité carbone de l’UE. Dans le meilleur des cas, il ne couvrirait qu’un tiers des dépenses dans le domaine.

L’Europe fait cavalier seul

Les auteurs, Mark Leonard et Ivan Krastev, le président du Centre d’études libérales de Sofia, pensent que ces attentes en matière de coopération découlent du fait que les citoyens de l’UE ont l’impression que l’Europe doit faire cavalier seul lors de crises mondiales.

Dans sept des neuf pays sondés, lorsqu’on a demandé aux personnes interrogées quel était leur principal allié pendant la crise du coronavirus parmi l’UE, les États-Unis, la Chine ou l’OMS, la plus grande partie d’entre elles ont répondu « personne ». Nombre d’entre elles ont également indiqué avoir une moins bonne opinion de la Chine et des États-Unis.

Les résultats sont particulièrement frappants dans le cas des États-Unis. Au total, 59 % des Européens interrogés indiquent que l’image qu’ils se faisaient de l’Amérique s’est détériorée. L’ECFR révèle que la situation est encore pire au Danemark, au Portugal et en Allemagne, où ce chiffre s’élève 71 %, 70 % et 65 %, respectivement.

« Votre avis sur les États-Unis a-t-il changé au cours de la pandémie ? »

Compte tenu du sentiment de désillusion générale, les leaders européens ne doivent pas confondre coopération et adhésion aux idéaux de l’UE ou solidarité accrue, affirment les deux auteurs du rapport. Au contraire, « les Européens peuvent voir qu’en n’agissant pas ensemble, ils risquent de devenir les victimes d’un jeu d’intimidation sino-américain », soulignent-ils.

C’est pourquoi Mark Leonard et Ivan Krastev suggèrent de formuler des arguments en faveur d’une intégration qui revêt un intérêt au niveau national. Ils affirment que le besoin de coopération ne naît pas « de la volonté de renforcer les institutions, mais s’explique par une peur plus profonde de perdre le contrôle dans un monde dangereux ». « C’est une Europe de la nécessité plutôt que du choix ».

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