Les candidats à la tête de la Commission pourraient être éconduits

"EU leaders". Photo Georgi Gotev

"EU leaders". Photo Georgi Gotev

Selon un expert espagnol, un candidat de compromis sera privilégié à ceux proposés par les groupes politiques européens. Il prédit un statu quo politique, avec une coalition gauche-droite. Et des eurodéputés énervés.

José Ignacio Torreblanca, directeur du bureau espagnol du Conseil européen des relations étrangères, est spécialiste des questions politiques européennes. Il vient de signer le rapport de son organisation consacré à la manière de réagir contre la montée des eurosceptiques : « The Eurosceptic surge and how to respond to it ».

Selon lui, ni le candidat socialiste Martin Schulz, ni le candidat du Parti populaire européen (PPE) Jean-Claude Juncker ne remplacera José Manuel Barroso à la tête de la Commission.

Face à une montée attendue des populistes et des eurosceptiques, seule une grande coalition entre le centre-gauche et le centre-droit pourrait fonctionner au Parlement européen. Or aucun de ces groupes ne devrait accepter de laisser la main au candidat de parti concurrent.

Des coalitions trop fragiles

José Ignacio Torreblanca indique qu’une coalition entre socialistes, verts et libéraux ne serait pas suffisamment forte étant donné qu’elle récolterait moins de 51 % des eurodéputés nécessaires pour former une majorité.

Une coalition entre le PPE, les libéraux et les Conservateurs et réformistes européens ne fonctionnerait pas non plus. Un leader libéral proeuropéen, comme Guy Verhofstadt, ne pourrait pas collaborer avec les Tories ou les eurosceptiques du Parti paysan polonais.

« La coalition la plus probable est celle qui gouverne de facto à l’heure actuelle », selon le politologue. Il fait ainsi référence à l’accord de consensus entre le centre-gauche et le centre-droit qui a abouti à la rotation de personnalités des deux groupes à la présidence du Parlement européen entre 2009 et 2014.

Allemagne, bis repetita

D’après lui, un tel accord est « une répétition de ce qu’il s’est passé en Allemagne au niveau européen ». Les conservateurs d’Angela Merkel s’étaient effectivement associés aux sociaux-démocrates après les élections fédérales de septembre 2013.

Interrogé sur le partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement (PTCI), le texte de loi le plus difficile à faire adopter au Parlement, José Ignacio Torreblanca estime que, même une grande coalition comprenant PPE, socialistes et libéraux ne suffirait pas. Les socialistes pourraient se diviser sur la question et il est difficile de prédire si cette loi sera adoptée.

Eviter la colère des eurodéputés

Selon le politologue espagnol, les États membres pourraient chercher à éviter l’éventuelle colère des eurodéputés suscitée par la désignation d’un candidat autre que parmi les têtes de liste des principaux partis. Les États membres pourraient privilégier« des personnalités de première classe » pour les postes de commissaire, dont l’un d’entre eux occupera la présidence.

José Ignacio Torreblanca considère que le prochain président de la Commission sera de la même nature que José Manuel Barroso. Il était en effet l’un des candidats des principaux groupes (PPE) et a reçu le soutien des socialistes espagnols et portugais.

En particulier, si aucun parti ne se démarque clairement à la sortie des élections, le Conseil aura alors le dernier mot, assure-t-il. Et le Parlement devra alors décider s’il veut aller contre l’avis du Conseil ou non.

Candidats-surprises, le retour

Un certain nombre de personnalités politiques, considérées comme des « candidats-surprises », pourraient émerger si les dirigeants des États européens décidaient de ne pas tenir compte des résultats des élections. Le premier ministre finlandais, Jyrki Katainen (PPE) a déjà déclaré qu’il était « disponible ».En cas de désignation du candidat selon les modalités de la procédure traditionnelle, deux personnes de compromis sont pressenties : Christine Lagarde, la directrice générale du Fonds monétaire international (PPE) et la première ministre danoise Helle Thorning-Schmidt (socialiste).

Martin Schulz, en campagne électorale, mais toujours en fonction à la tête du Parlement, a fait clairement savoir que le prochain parlement ne soutiendrait pas un candidat désigné à huis clos.

Les élections européennes seront organisées dans tous les États membres en mai 2014.Le traité de Lisbonne, entré en vigueur le 1er décembre 2009, prévoit que le Parlement européen élira le président de la Commission sur la base d'une proposition du Conseil qui tiendra compte des élections européennes (Article 17, alinéa 7 du TUE).Cette disposition s'appliquera pour la première fois dans le cadre des élections de 2014.

 Le Parlement européen et de nombreux spécialistes ont incité les partis à désigner leur tête de liste pour les campagnes électorales. Les élections européennes seront de facto une course à la présidence de la Commission. Les campagnes pourraient être plus politisées et le taux de participation des électeurs pourrait grimper.

 D'autres responsables politiques estiment toutefois que désigner son propre candidat ne serait pas la solution idéale. Les attentes accrues pourraient facilement engendrer de la déception. M. Van Rompuy a d'ailleurs appelé à plusieurs reprises à la prudence : le Conseil européen pourrait choisir un autre candidat que la tête de liste du parti vainqueur.

  • 22-25 mai 2014 : élections au Parlement européen
  • Novembre 2014 : désignation de la nouvelle Commission européenne

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