Les messages de solidarité adressés à la France déferlent de tout le continent. Mais, derrière ces paroles d’unité et d’angoisse, trois grandes questions sont en train de diviser l’Europe. Selon la manière dont nous les traiterons, l’Union européenne sortira des événements parisiens plus forte et avec ses valeurs intactes ou bien le terrorisme fera voler en éclats sa fragile unité.

La première oppose ceux qui veulent fermer les frontières nationales à ceux qui souhaitent une riposte commune de l’Europe. Bien que les informations soient encore incomplètes et contradictoires, elles indiquent que les attaques sont de source européenne : un Français fiché par les services de lutte antiterroriste, des complices belges dont les armes pourraient avoir été fournies par un ressortissant monténégrin, la découverte d’un faux passeport syrien près du corps d’un terroriste qui se serait infiltré en Europe par l’île grecque de Leros et aurait poursuivi sa route vers l’ouest en passant par les Balkans.

Quelques heures après les attaques, le nouveau gouvernement polonais a attribué celles-ci à la politique européenne des réfugiés et menacé de ne plus respecter les quotas. Le Premier ministre slovaque, Robert Fico, en a fait autant. Avant même qu’elles aient lieu, le président du Conseil européen, Donald Tusk, avait évoqué la “course contre la montre” menée par l’UE pour sauver l’espace Schengen. L’Autriche, l’Allemagne, la Slovénie, la Hongrie et la Suède ont pris des mesures pour renforcer leurs frontières. Les attentats de Paris placent au premier plan des questions comme les mesures de restriction à prendre avec les terroristes présumés connus, la coopération entre les forces de police et les services de renseignement et les contrôles frontaliers.

Une Europe déspiritualisée

Les conséquences politiques sont tout aussi importantes. En France, la question qui se pose aujourd’hui est de savoir si les attaques perpétrées à Paris vont jouer en faveur du Front national. Mais dans toute l’Europe on voit apparaître des partis qui attirent ceux que les politologues appellent les “majorités menacées”, des majorités qui, par crainte d’un changement démographique, se comportent comme des minorités. Renaud Camus, un intellectuel français lié à l’extrême droite, a exposé cette thèse réactionnaire dans un livre intitulé Le Grand Remp